Lyon en marche vers la libération des trottoirs

La marche à pied est la première des mobilités et la plus universelle. Elle est nettement la moins polluante et bonne pour la santé.  Elle représente déjà en 2015 à Lyon 45% des déplacements et avec 38% des trajets en voiture qui font moins de 3 km [1], elle présente également un énorme potentiel de développement dans les années à venir. Pour compléter ce diagnostic synthétique, la sédentarité a gagné du terrain dans notre société, alors même que les professionnels de santé conseillent aux adultes et enfants de faire 6000 à 8000 pas par jour ou de marcher respectivement 30 et 60 minutes par jour [2].

La conclusion est sans appel : il faut remettre le confort de la marche au centre des politiques publiques ; sécuriser la marche à pied ; faciliter les déplacements des personnes à mobilité réduite. Bref, faire de la marche à pied la priorité !

Sortir du « yakafocon » pour agir

Le « yakafocon » est simple. Probablement, l’ensemble des citoyennes, citoyens et responsables politiques sont d’accord avec le paragraphe précédent. En tant qu’exécutif écologiste, il s’agit de concevoir réellement, de faire concrètement, de mettre en place assurément.

Un des sujets majeurs identifiés est la libération des trottoirs. Pourquoi ? Parce que malgré des plans d’investissement record et un volontarisme politique fort sur un nouveau partage de l’espace public, les moyens financiers et humains sont limités pour réaménager l’espace public. La Ville de Lyon a une surface de 47.87 km² et possède environ 750 km de voirie. Impossible de réaménager l’ensemble du territoire ! Ainsi, le sujet devient celui de conforter au maximum les espaces piétons qui ont le mérite d’exister. Nous y reviendrons. Avant cela, il est important de prendre de la hauteur et évoquer le premier plan piéton et les projets qui transforment plus globalement l’espace public.

Le premier plan piéton de la Métropole de Lyon

En Juin 2022, la Métropole de Lyon a adopté le premier plan piéton du territoire. C’est assez exceptionnel pour le noter, bien que cela devrait être tout à fait ordinaire. Il comporte un plan d’action spécifique à hauteur de 25 M€ :

  • Préservation et amélioration de la qualité des cheminements piétons, notamment en définissant comme pour la voirie des critères objectifs pour entretenir les trottoirs
  • Création de nouveaux aménagements, dont créations de trottoirs
  • Sécurisation des abords des collèges
  • Magistrale piétonne Part-Dieu <> Bellecour
  • Apaisement des vitesses via la démarche « ville 30 »
  • Elaboration de documents de cadrage et guides techniques

Ce plan d’action s’intègre en réalité dans un programme bien plus vaste de 320M€ d’investissement en faveur des mobilités actives (marche et vélo) sur le territoire de la Métropole.

Une démarche ambitieuse de « rues des enfants »

Parmi ce programme plus vaste, il existe tous les petits ou grands projets de réaménagements des espaces publics, ainsi que la démarche spécifique de « rue des enfants ». L’objectif est simple : sécuriser les déplacements des enfants et de leurs parents et réaménager l’espace public pour le rendre plus agréable et confortable. Intégré dans la vision de la « ville des enfants », il s’agit avant tout d’avoir une attention pour les plus vulnérables, afin de concevoir des espaces publics plus agréables pour toutes et tous.

A horizon automne 2023, la démarche « rue des enfants » lyonnaise aura déjà bénéficiée à 15 300 enfants dans 92 établissements (primaire, maternelle, crèche). Près de la moitié des sites réaménagés est concerné par une piétonisation de l’espace public. Dans d’autres cas, il s’agit de zones de rencontres, d’amélioration de traversées ou de créations de trottoirs.

Rue des enfants Viricel

La piétonisation des cœurs de quartier au centre du projet politique

D’autres projets s’inscrivent dans cette démarche, par exemple tous les réaménagements de places ou placettes, la création d’aires piétonnes ou encore de zones de rencontre. A l’été 2023, ces dernières ont déjà évolué respectivement de +50% et +85% par rapport à 2020.

Deux éléments phare de notre vision de la ville (et métropole) sont (1) l’amélioration du bien-être et (2) les multipolarités. D’abord, cela veut dire rendre la ville et ses espaces publics plus agréables et plus attrayants. Ensuite, cela veut dire conforter les cœurs de quartiers ou centre-bourgs, notamment ceux attirant les habitants de ces quartiers avec des commerces, services publics et autres. La vision de la ville et métropole n’est pas celle d’un objet centralisé, mais d’une ville et métropole avec des cœurs de quartier qui s’affirment davantage, au bénéfice des habitants, des commerces, de l’équilibre général du territoire.

C’est pourquoi la « piétonisation des cœurs de quartiers » est centrale ! Les retours d’expérience en France, en Europe et dans le monde sont nombreux. Des cœurs de quartiers piétons ou apaisés, végétalisés, confortés dans leurs dynamiques, sont des facteurs importants d’amélioration de la qualité de vie.

On peut citer quelques projets allant en ce sens : Presqu’île (1er et 2e), Avenue des Frères Lumière (8e), Rue du Mail et abords (4e), Place du Port Mouton et Grande rue de Vaise (9e), Cours Charlemagne (2e), quartier Saint-Georges (5e), Gratte-Ciel (Villeurbanne), etc.

Visuel projeté de la future avenue des Frères Lumière

Une nécessité d’améliorer l’existant en dehors des « grands projets »

Comme évoqué, tous ces projets mentionnés (dont certains visibles ici) ne suffisent pas à améliorer et conforter la marche à pied dans l’ensemble de la ville. Ils sont forcément plus ou moins localisés et pourtant toute la ville mérite de mieux pouvoir se déplacer à pied !

Cela est d’autant plus important qu’il s’agit du mode de déplacement le plus universel. Aussi, Lyon compte aujourd’hui 18,9% de personnes de plus de 60 ans [3], en augmentation continue. Pour les personnes âgées et, en général, pour les personnes à mobilité réduite, c’est capital pour avoir une ville plus inclusive.

La mesure majeure pour cela est de libérer les trottoirs des mobiliers urbains encombrants. Pour observer tous les changements concrets que nous comptons mettre en œuvre, baladons-nous virtuellement sur le cours Gambetta, depuis la place Aristide Briand en direction de l’est.

On aperçoit sur la gauche un emplacement trottinettes. En parallèle de la régulation générale des trottinettes électriques en libre-service, nous avons engagé un travail colossal pour créer plus de 330 stations dédiées. Les trottinettes doivent obligatoirement arrêter leurs trajets dans un emplacement dédié. Dans certains quartiers avec des usages moins intensifs, cet emplacement dédié se fait sur un arceau vélo. Cela permet de libérer les trottoirs des trottinettes qui y stationnaient.

De l’autre côté de l’angle de la pharmacie, il y a cinq arceaux vélos. Une des premières décisions à Lyon est de ne plus poser de nouveaux panneaux indiquant les arceaux vélos. Ces derniers se multiplient fortement et possèdent une visibilité spéciale quant à leur présence majoritaire dans les angles de carrefour. D’ailleurs, ils ne sont plus installés sur les trottoirs, alors que cela a pu être le cas précédemment (et c’est donc encore le cas à certains endroits, de même que pour les panneaux).

Dans l’angle du carrefour avec l’avenue Felix Faure, on observe plusieurs panneaux publicitaires. La Métropole de Lyon a, conformément aux engagements pris, voté un nouveau règlement de publicité, limitant fortement la publicité dans l’espace public. Naturellement, il existe des enjeux patrimoniaux, écologiques, paysagers, mais l’un des enjeux est aussi l’insertion urbaine et la libération des cheminements piétons. Voilà donc un nouveau règlement protégeant le patrimoine, protégeant l’environnement et protégeant les piétons. Selon les endroits, 60% à 90% de la publicité sera supprimée de l’espace public.

Panneau publicitaire entravant le cheminement piéton (1er arrondissement)

Continuons le chemin jusqu’à l’angle avec la rue André Philip. Une terrasse sur stationnement s’installe ici en période estivale. Avec un nouveau règlement des terrasses, la place des piétons est réaffirmée avec une instruction prenant davantage en compte les flux piétons sur les trottoirs. Aussi, le nouveau règlement permet de sévir plus fortement contre les contrevenants ne respectant pas les emprises autorisées, réduisant la largeur piétonne.

En se rapprochant du carrefour avec la rue Garibaldi, on observe la présence de nombreux mâts. Tout comme pour les panneaux, nous avons également une attention quant à la gêne occasionnée par certains mâts d’éclairage qui ont été mal positionnés et entravent le cheminement des piétons.

Mât d’éclairage déplacé en dehors du trottoir (8e arrondissement)

Tournons à droite dans la rue Garibaldi en attente de requalification prochaine. A hauteur de la place Stalingrad, les nouvelles bornes pour biodéchets se sont installées dans le paysage lyonnais. Il s’agit d’une nouvelle politique, bénéfique pour l’environnement et la collectivité, mais qui amène effectivement de nouveaux objets urbains dans l’espace public. Elles sont exclusivement positionnées sur la bande de stationnement ou des places avec des cheminements très confortables. Par ailleurs, elles permettent de valoriser les déchets organiques et ainsi retourner des nutriments à la terre !

Enfin, à l’angle avec la grande rue de la Guillotière, c’est une piste cyclable unidirectionnelle qui a été aménagée. De manière générale, les pistes cyclables servent naturellement à sécuriser les cyclistes de tous âges et expériences dans leurs déplacements. Cela a aussi un effet bénéfique sur les piétons : un cycliste en sécurité ne roule plus sur les trottoirs, réduisant ainsi les conflits piétons-vélos. Un travail spécifique est aussi engagé sur les ponts de la ville, en particulier Morand, Lafayette, Wilson et Université pour séparer plus clairement les flux et ainsi sécuriser les usagers piétons.

Voie lyonnaise 1 en direction du Parc de la Tête d’Or

Un dernier sujet concernant les trottoirs mérite toute notre attention. De nombreux potelets ont dû être installés pour éviter le stationnement gênant de voitures, à cheval sur les trottoirs. Ces potelets grèvent la largeur des trottoirs de 10-30 cm. L’objectif est d’en mettre le moins possible et une réorganisation vient de pair pour renforcer le contrôle du stationnement gênant côté ASVP.

Il y aurait encore tant de choses à dire sur les déplacements piétons. L’objectif n’est pas toutefois de rentrer dans un catalogue exhaustif des mesures prises pour conforter la marche à pied. Un chantier important reste en suspens pour développer encore davantage l’usage piéton : conforter de grands axes piétons très accessibles et ombragés et surtout améliorer la signalétique piétonne pour identifier simplement combien de temps est nécessaire pour rejoindre tel service public ou tel autre pôle d’attraction de la ville. A suivre!

Références:
[1] EDGT 2015
[2] https://sante.gouv.fr/prevention-en-sante/preserver-sa-sante/article/activite-physique-et-sante

https://www.thelancet.com/journals/lanpub/article/PIIS2468-2667(21)00302-9/fulltext
[3] INSEE 2020

Un avis sur « Lyon en marche vers la libération des trottoirs »

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