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La mobilité est au cœur de nos modes de vie en 2021. Dans une agglomération comme celle de Lyon, elle est très diverse dans ses usages. Les besoins ne sont pas les mêmes selon les populations, il y a les trajets domicile-travail, mais également de nombreux autres trajets au quotidien, par exemple des déplacements contraints liés à la vie du foyer. Au-delà de ces aspects, la mobilité est aussi celle du loisir pour les balades ou pour sortir de l’agglomération le temps d’une après-midi, d’une journée, d’un weekend ou davantage. Pour répondre à ces besoins, tout en les intégrant dans les grands enjeux de notre époque, les politiques publiques doivent être adaptées au plus proche de la réalité actuelle et à court-terme, tout en se projetant dans un avenir plus lointain.
Je tiens à préciser que cet article ne concernera que les déplacements des personnes et non les transports de marchandises. Un article récent aborde déjà en partie ce sujet. Il ne se veut pas non plus exhaustif sur les approches et géographies de la mobilité et ne rentrera pas dans le détail de tous les outils utilisés pour entamer cette transition. Enfin, il pourra évoluer dans le temps et répondre à certaines questions sous forme d’une FAQ en fin d’article.
Un contexte d’importance
Il est impossible d’aborder le sujet des transports sans parler des grands enjeux de notre époque, dont le changement climatique et la pollution de l’air. A l’échelon national, le secteur des transports représente plus de 30% des émissions de gaz à effet de serre [1]. La majorité des émissions est liée à la combustion du carburant dans les véhicules thermiques ou avions. Cette combustion émet des quantités importantes de CO2.


Dans la Métropole de Lyon, comme dans d’autres grandes villes et métropoles du monde, le secteur des transports est le premier poste émetteur de gaz à effet de serre avec le secteur du bâtiment [2]. Comme l’indique le graphique ci-dessus, dans la Métropole de Lyon en 2015, 29% des émissions étaient liées au transport routier. Il est à noter que ces analyses d’émissions correspondent, comme souvent, seulement aux scope 1 et 2. Cela signifie que les émissions liées à la production des véhicules, et autres énergies grises, ne sont pas prises en compte. Le calcul territorial des émissions liées à l’aviation peut également être questionné.
Ce qui est important de comprendre, c’est que nous devons massivement diminuer nos émissions de GES liées aux transports, de l’ordre de 90% au global d’ici 2050 selon l’ONU. Cela correspond à une réduction plus forte et plus rapide dans les grandes agglomérations, ayant des opportunités facilitées de développement des alternatives à la voiture.
Le graphique de gauche indique la trajectoire définie par la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC), en particulier dans sa première version compatible avec les objectifs définis par les accords de Paris en 2015. La version révisée marque un net recul par rapport aux ambitions. On remarque que le secteur des transports a eu du mal à diminuer ces émissions ces dernières années. Cela est particulièrement dû à un usage croissant et à un effet rebond annulant les efforts effectués en termes d’innovation technologique. Ainsi, afin de retrouver une trajectoire compatible avec un changement climatique bien en-deçà de +2°C et visant +1.5°C, nous devons diminuer nos émissions GES du transport de 30% jusqu’en 2026. Cela permettra de retrouver une trajectoire à la hauteur et nécessitera des efforts similaires dans les années suivantes pour décarboner intégralement nos mobilités.
L’autre grand enjeu des agglomérations urbaines est celui de la pollution de l’air. Il s’agit là d’un ensemble de différents types de polluants : les oxydes d’azote NOx, les particules fines et très fines PM10-PM2.5-PM1, l’ozone O3, les composés organiques volatiles COVnm et autres.
Lyon fait partie de 8 métropoles françaises faisant l’objet d’un contentieux de la part du Conseil d’Etat français, en particulier sur le dépassement des seuils règlementaires liés au dioxyde d’azote (NO2) et aux particules fines. En août 2021, il a condamné l’Etat français à une pénalité de 10 millions d’euros [3]. Il fait également l’objet d’une procédure de la Commission Européenne pour le dépassement des seuils pour les particules fines et a été sommé d’agir rapidement [4].
Une question de santé publique
L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a défini pour chaque polluant des seuils à ne pas dépasser pour garantir la santé de la population [5]. Ces seuils ont été mis à jour à l’automne 2021 suite à un nouveau tour d’horizon scientifique des impacts de la pollution de l’air sur la santé humaine. Le constat est effarant, toutes les populations des zones urbaines subissent des impacts négatifs sur leur santé. Ainsi, l’OMS a annoncé abaisser ses seuils recommandés, parfois une division par trois ou plus des seuils précédents. Il existe un seuil à ne pas dépasser sur une moyenne annuelle et un autre sur une exposition à court-terme sur 8 ou 24 heures.
ATMO Auvergne Rhône Alpes montre dans son rapport de 2019 [6] que la tendance de réduction de la pollution de l’air est bonne sur ces dernières années.

Toutefois, il nous enseigne aussi qu’à proximité du trafic routier, les (anciens donc nouveaux) seuils de l’OMS sont encore dépassés pour les NO2 et les PM10 et que les particules fines PM2.5 restent encore au-dessus du (ancien donc nouveau) seuil de l’OMS en moyenne annuelle (graphique ci-dessous ; avec les anciens seuils OMS). Il est à noter que l’indicateur de suivi ATMO a récemment évolué, afin de mieux prendre en compte les particules fines. Il est également important de savoir que pour certains polluants, les valeurs limites règlementaires en France ne sont pas alignées sur les recommandations de l’OMS.


Bien évidemment, le trafic routier n’est pas le seul responsable de la formation de ces polluants. Selon les types de polluants, le chauffage (fioul, bois), les industries ou encore les conditions météorologiques continentales y contribuent significativement.
La pollution de l’air est donc un enjeu majeur de santé publique. Selon Santé Publique France et un rapport de la commission d’enquête du Sénat [7], il s’agirait à l’échelon national de 40 à 60 000 décès prématurés par an liés à la pollution de l’air et un coût de santé publique associé de l’ordre de 100 milliards €. Dans la Métropole de Lyon, le nombre de morts prématurés par an devrait être de plusieurs centaines.
Le secteur des transports a ainsi son rôle à jouer dans cette mission d’amélioration de la santé des habitants. Nous voyons que la réduction liée au renouvellement du parc automobile est là, mais insuffisante si nous souhaitons résoudre rapidement cette menace sanitaire. L’outil des Zones à Faibles Emissions (ZFE) basé sur les vignettes crit’air [8] nous permettra d’accélérer la réduction de la pollution de l’air. Après la ZFE pour les professionnels mise en place sous la précédente mandature, il est temps de l’appliquer progressivement aux particuliers, correspondant à des centaines de milliers de véhicules. L’objectif fixé est la sortie du diesel à un horizon 2026 dans un périmètre central, afin d’améliorer la qualité de l’air pour une bonne partie de la population. Nous avons prévu une concertation d’ampleur pour définir le séquençage, et les mesures d’accompagnement souhaitables pour cette transition. La ZFE est également une opportunité pour la transition des mobilités, car elle permet de rebalayer les cartes et offrir à chacun un moment de réflexion sur sa mobilité, ses besoins et les solutions les plus adaptées. Une agence des mobilités, telle que cela existe ailleurs, pourra apporter une aide personnalisée.
Ainsi, afin d’atteindre nos objectifs climatiques, le remplacement 1:1 d’un véhicule polluant par un véhicule moins polluant (électrique ou crit’air 1) n’est pas souhaitable. Les métaux et autres matériaux nécessaires, ainsi que l’énergie et les émissions GES associées à la fabrication des véhicules ne permettent pas d’envisager une transition écologique cohérente.
Ceci est d’autant plus vrai que des études récentes [9] nous indiquent que la création de particules fines est également significativement liée à l’usure des plaquettes de freins et des pneus. Ceci est accentué par l’alourdissement progressif des véhicules, sur lequel nous reviendrons. Un scénario de remplacement total de véhicules thermiques par des véhicules électriques (plus lourds) pourraient ainsi également amener à une augmentation des émissions de particules fines PM2.5 avec des conséquences sanitaires cardiovasculaires, respiratoires et autres. Il est à noter, que malgré le poids plus important par rapport à un véhicule thermique de même gabarit, une voiture électrique sollicite moins les plaquettes de frein, grâce au freinage régénératif [10].
La transition des mobilités doit donc se réfléchir à l’échelle d’un bouquet de solutions et d’alternatives à la voiture individuelle pour offrir à chacune et chacun une solution de mobilité adaptée et respectueuse de l’environnement urbain et planétaire.
Toutefois, l’enjeu sanitaire de cette transition ne s’arrête pas là. Chaque année, entre 20 et 30 accidents mortels ont lieu dans la Métropole de Lyon liés à un accident de la route [11]. Dans le même temps, plus de 300 personnes sont hospitalisées suite à un accident. L’accidentologie est un de ces sujets dont on parle très peu, mais qui correspond au quotidien des habitantes et habitants des métropoles.

Cette menace pour la santé humaine n’est pas acceptable et encore moins lorsqu’il s’agit de blessés graves ou de décès. D’autres villes telles que Helsinki et Oslo ont adopté une feuille de route « Vision zéro » et récoltent leurs premiers fruits. En 2019, aucune d’entre elles ne comptait de décès piéton – parmi les plus fragiles dans l’espace public. Des villes comme Montréal ont décidé de construire des plans d’actions [12] pour réduire à zéro les morts de la route. L’objectif est de doter le territoire lyonnais d’une telle feuille de route pour ne plus subir ces drames.
Il s’agit d’abord d’opérer un meilleur partage de la voirie pour rééquilibrer son usage en fonction des différents modes de déplacements. Quand 60-75% de la voirie est dédiée à la voiture, il s’agit d’un enjeu d’espace public, mais également de sécurité. Notre volonté est donc de rendre plus sûr et confortable les cheminements des modes actifs. De préférence, ce sont donc des aménagements accessibles à tous les publics et séparés des autres flux.
Il s’agit aussi d’augmenter la visibilité et de sécuriser les traversées dans les carrefours pour éviter qu’un piéton n’apparaisse brusquement derrière une voiture garée et soit frôlé ou fauché par un véhicule en mouvement. La loi nous aide sur ce sujet. La Loi d’Orientation des Mobilités (LOM) oblige les collectivités à progressivement supprimer les places de stationnement qui se situent 5 mètres en amont des passages piétons, afin d’augmenter la co-visibilité. Ces emplacements seront seulement utilisés par des arceaux vélos, emplacements trottinettes, végétation basse ou autres dispositifs peu gênants. Il est à noter que cela constitue un avantage supplémentaire : une lisibilité améliorée des endroits où trouver des arceaux vélos, majoritairement dans le prochain carrefour.
Enfin, il s’agit de diminuer les vitesses pratiquées en ville en inversant la logique. Toutes les voies seront règlementées à 30 km/h à l’exception de quelques grands axes maintenus à 50 ou 70 km/h. En effet, à 30 km/h, la gravité potentielle d’un accident entre une voiture et un piéton chute significativement. Il ne faut pas être naïf, il y aura toujours des accidents, mais si nous pouvons en diminuer l’impact, c’est capital !
La « Ville 30 » a également un autre avantage, à savoir la diminution du bruit de fond en ville [13]. La plupart du bruit est lié à la circulation et non au fonctionnement du moteur. Il est lié aux accélérations et à la vitesse pratiquée, c’est pourquoi une baisse des vitesses maximales, entrainant une baisse des accélérations, est bénéfique pour le bruit. Selon l’OMS, le bruit est un facteur aggravant la santé, en particulier sur le risque cardiovasculaire [14].
De la sédentarité à la mobilité active
Enfin, notre santé dépend également de notre activité physique. Dans un monde de la voiture et des transports en commun, davantage tertiaire qu’autrefois, notre activité physique du quotidien est limitée. L’enjeu de faire régulièrement du sport est immense, et est source de loisirs et de lien social, mais l’activité physique peut aussi se pratiquer au quotidien avec la marche ou le vélo. L’étude publiée dans le British Medical Journal [15] en 2017 indique par exemple, qu’entre 40 et 60 ans, se rendre à vélo au travail diminue de 45% le risque de cancer et de 40% le risque de décès prématuré, toutes causes confondues. Ainsi, les politiques publiques devraient davantage encourager la pratique du vélo et la marche, y compris au quotidien.
Pour inciter à la marche, il est d’abord essentiel d’avoir des cheminements piétons continus et de qualité. Dans une ville âgée de 2000 ans et ayant un urbanisme largement hérité d’autres époques, ce n’est pas chose évidente. Une bonne partie des trottoirs sont étroits, y compris en respectant le seuil règlementaire de 1,40 mètres de largeur. Si certains élargissements de trottoirs seront effectués, cela ne pourra se faire d’une manière générale. Ainsi, il est essentiel déjà de maintenir les trottoirs existant en bon état et de les libérer de tous obstacles, en particulier gênants pour les personnes à mobilité réduite. Ainsi, la sanctuarisation des trottoirs se fera progressivement dans la mandature en y limitant la présence de panneaux, mobiliers urbains divers, vélos ou trottinettes stationnés, etc. Sur ce dernier point, l’aménagement de zones de stationnement dédiées permettra d’éviter les stationnements sur trottoir. L’emprise des terrasses sur trottoir sera également regardée.

Toutefois, de nombreuses rues se prêtent à d’autres aménagements pour donner plus rapidement de la place aux piétons. Il s’agit de secteurs dans les cœurs de quartier ou aux abords d’établissements scolaires ou autres qui sont particulièrement fréquentés et auraient un net avantage à être intégralement piétonnisés pour le confort de toutes et tous. Ce sont des espaces avec une densité importante de commerces, offres culturelles ou services publics. Il s’agit également de créer de nouvelles zones de rencontre avec des aménagements cohérents pour limiter les conflits entre piétons et autres circulations, tout en donnant plus de place sur la chaussée et la priorité pour les piétons. Malgré cela, au beau milieu d’immeubles d’une certaine hauteur, nous sommes parfois bien perdus en ville. Il est difficile de se rendre compte que la gare de la Part-Dieu est à seulement 15 minutes à pied des quais du Rhône. Il y a donc de quoi faire pour améliorer la « marchabilité » en ville en créant un jalonnement piéton dans l’espace public. Des panneaux pour indiquer aux passants les temps de trajet vers tel ou tel autre point d’intérêt en ville, bien au-delà des signalétiques touristiques parfois existantes.
Enfin, pour lutter contre cette sédentarité, il s’agit de développer la pratique du vélo avec des aménagements cyclables confortables et des services associés. Nous reviendrons sur la constellation de la bicyclette un peu plus loin.
Décarboner les transports
Avant de continuer, nous avons besoin de préciser le diagnostic établi sur la question climatique liée aux transports. Il n’a été que très partiellement abordé en introduction.
Il ne me semble pas utile de revenir sur la trajectoire définie par la SNBC, de l’ordre de -30% d’ici 2026. Il peut toutefois être utile de souligner que cette diminution était imaginée fin 2015 par rapport à 2014, mais les émissions GES du secteur des transports ont quasi stagné jusqu’en 2019… Similaire aux autres domaines, il est toujours regrettable qu’une transition ne soit pas entamée au plus tôt, cela oblige à accélérer avec un accompagnement et une adhésion sociale potentiellement plus difficiles.
Plongeons quelques instants dans l’excellente thèse d’Aurélien Bigo de fin 2020 intitulée « Les transports face au défi de la transition énergétique » [16]. Le premier enseignement particulièrement intéressant (graphique de gauche ci-dessous) est celui de l’augmentation des émissions parallèlement à l’augmentation de la vitesse (surtout voiture et avion) et de la demande, portée par l’augmentation de la population et l’effet rebond associé à l’augmentation de la vitesse. Les avancées technologiques en matière d’efficacité énergétique auront surtout servi à compenser la croissance de la demande. Bigo note également que, tandis que les temps de trajets sont restés relativement stables, les distances ont fortement augmenté (graphique de droite), porté par l’essor de la voiture et plus récemment des trajets nationaux et internationaux en avions.
A l’inverse de nombreuses études (par exemple les études ménages-déplacements des collectivités), il serait donc intéressant de ne pas seulement comptabiliser les parts modales en temps de trajet, mais aussi en distance. En effet, c’est bien la distance qui est proportionnelle aux nombreuses externalités négatives.
On perçoit ainsi dans le travail d’Aurélien Bigo que, étant donné la sortie totale des énergies fossiles pour les transports projetés d’ici 2050 au plus tard, la transition énergétique d’une part, mais surtout la sobriété d’autre part seront au cœur de la transition des mobilités. Ainsi peut-on lire dans sa thèse que « la sobriété, qui intéresse les facteurs de demande, de report modal, de remplissage, et en partie d’efficacité (poids, vitesse), permettrait d’effectuer environ la moitié du chemin comparé à un scénario tendanciel, facilitant en retour la décarbonation de l’énergie« , avant de poursuivre : « Si la technologie présente des risques d’effets rebonds, de ressources limitées, d’impacts environnementaux indirects et de coûts importants, la sobriété permet de limiter ces risques. Les freins à lever pour la sobriété sont cependant les changements de comportement, l’acceptabilité ou encore les impacts possibles sur l’emploi« .


Parmi les opportunités évoquées en termes d’efficacité, nous retrouvons le poids du véhicule. En effet, le poids est un bon indicateur quant à l’impact environnemental d’un véhicule. Une voiture est surtout composée de métal et de plastique et plus récemment des différents composants d’une batterie électrique. Plus la voiture est lourde, plus il y a donc de matériaux lourds utilisés, ce qui est le résultat d’une extraction importante de ressources (surtout métaux) et d’une transformation énergivore (plastique, batteries, châssis, etc.). Le poids est également un bon indicateur des pollutions lors de la circulation du véhicule. Plus un véhicule est lourd, plus il a besoin d’énergie pour se déplacer. Il consomme plus de carburant et émet ainsi davantage de CO2, ou d’électricité et induit une installation d’une batterie avec une capacité plus importante, ainsi augmentant le besoin en ressources. Comme vu précédemment, la pollution de l’air provient d’une manière non négligeable des pneus et des plaquettes de frein. Ainsi, une voiture plus lourde dégrade plus rapidement ces éléments. Enfin, elle a besoin de plus de temps/distance pour freiner et peut avoir des conséquences plus dramatiques en cas d’accident [17].
Malheureusement, le constat est clair : il y a une tendance de long terme à l’alourdissement des voitures [18]. Elle est liée d’une part aux normes de sécurité ayant été décidées ces dernières décennies et plus récemment à la mode des SUV (Sport Utility Vehicle), plus volumineux. La convention citoyenne pour le climat, composée de 150 citoyens tirés au sort pour faire des propositions concrètes sur la trajectoire climatique de la France, s’est basée sur l’idée d’un bonus-malus à l’achat en fonction du poids du véhicule [19]. C’est un système qui pourrait être conçu d’une manière incitative et neutre financièrement, les malus finançant les bonus. A l’échelon local, nous travaillerons également sur les possibles incitations à l’utilisation de voitures plus légères, quand leur usage est nécessaire.
Beaucoup sont ceux qui critiquent l’avènement de la voiture électrique, notamment à cause de la batterie. Ils ont raison, ce sont des ressources métalliques limitées et dont l’extraction pose des questions environnementales (et sociales selon les endroits). C’est pour cela qu’un remplacement de tous les véhicules thermiques par des véhicules électriques n’est pas souhaitable – nul part. Il s’agit d’un moment opportun pour les citoyens et pouvoirs publics de ce monde pour repenser les mobilités et les usages en ville ou en campagne. Toutefois, pour les personnes ayant besoin d’une voiture, ce remplacement a de nets bénéfices en termes de CO2. Cela dépend d’un certain nombre d’hypothèses (mix électrique, composition et fabrication de la batterie, kilométrage de la voiture, etc.) et il y a de nombreuses analyses de chercheurs sur les analyses de cycle de vie. Ce site [20] permet de faire varier les différents paramètres et comparateurs des voitures thermiques et électriques. Dans la plupart des scénarios, sur le cycle de vie complet, une voiture électrique permet d’éviter de nombreuses tonnes de CO2.
Focus sur les trajets de longue distance
Nous l’avons vu, les pollutions des moteurs thermiques sont très largement fonction de la distance parcourue. En tant que ville touristique et parmi les destinations européennes les plus prisées pour un week-end de type « city trip », Lyon doit aussi faire sa part sur les trajets de longue distance. C’est avant tout une position de plaidoyer qu’il nous faut développer pour encourager tous les acteurs à décarboner les longs trajets.
D’abord, ce plaidoyer va à destination des lyonnaises et grands lyonnais. Que ce soit pour les sorties de week-end ou les vacances, privilégier le train, les cars, le covoiturage ou même directement le vélo permet de significativement réduire l’impact climatique. Nous avons souvent l’impression que l’impact d’un voyage occasionnel est faible, car il est ponctuel, mais c’est sa distance qui détermine si son impact CO2 est important ou non. En particulier les offres de TGV, TER ou cars interurbains ou internationaux sont particulièrement développées à Lyon, il est donc plutôt aisé d’éviter la voiture ou l’avion. Vu ses impacts très forts, ce dernier est naturellement à limiter au maximum. Pour rappel, un aller-retour Lyon-Lisbonne en avion émet au total près d’une tonne de CO2, soit 50% de l’objectif de 2 tonnes par an et par personne.
Une solution alternative sont les trains, ainsi que les cars internationaux qui roulent également de nuit pour les longs trajets. Lyon se positionnera également sur le sujet des trains de nuit qui retrouvent l’intérêt du public et permette(ro)nt, pour des vacances ou des voyages d’affaire, de voyager plus loin en Europe, tout en évitant l’avion.
D’ores et déjà, nous avons mis en ligne une page sur lyon.fr pour mettre en valeur des sites ou blogs encourageant des sorties de Lyon sans voiture.
Il s’agit donc de repenser plus globalement les mobilités des personnes, de réduire les distances en véhicule thermique et plus généralement les trajets en voiture individuelle. La bonne nouvelle, c’est que 56% des trajets de 2-3 km et 62% des trajets de 3-7 km à Lyon-Villeurbanne (graphique ci-dessous issu du PDU [21]) se font actuellement en voiture, alors que les transports en commun et le vélo sont particulièrement adaptés et compétitifs sur ces distances. Il y a là des dimensions d’efficacité temporelle, économique, écologique et sanitaire.

Par exemple, un trajet de l’Hôtel de Ville au Musée des Confluences fait environ 4,5 km en vélo, un trajet de Valmy à la gare de la Part-Dieu fait 6,3 km en vélo. Ce sont des distances accessibles à toutes et tous et le développement des réseaux de transports et de vélo aideront au développement de ces modes pour des trajets jusqu’à 10 km. Il s’agit donc de rendre confortable, accessible, sûr et qualitatif ces deux modes de déplacements.
Bus, tramways, métros, funiculaires, téléphériques : diversité, efficacité, accessibilité

Le réseau TCL est un des meilleurs de France sur les plans de la qualité de service, du maillage et de la compétitivité des différents modes. Aujourd’hui, le réseau piloté par le SYTRAL comporte des bus de tout type, des tramways, des funiculaires ou encore des métros.
Comme d’autres métropoles, Lyon fait face à une saturation des transports en commun aux heures de pointe. Le réseau lyonnais est performant et les capacités des bus, tramways ou métros vont encore augmenter les prochaines années, mais la saturation est là. Etait là. En effet, face à ce constat, nous souhaitions réaliser un choc d’offre en tout début de mandat pour améliorer les fréquences, capacités ou dessertes sur les lignes de bus, mais la crise sanitaire du COVID-19 est passée par là. L’usage des TC a fortement chuté durant cette période, même si la reprise est visible en cette rentrée 2021.
Les bus offrent la plus grande flexibilité dans la desserte du territoire, ainsi que dans la mise en place d’un nouveau service ou l’adaptation d’un service existant. Avec le développement des « coronapistes », dont beaucoup de couloirs bus-vélos, les bus nouvellement en « site propre » ont pu bénéficier d’améliorations significatives de temps de parcours ou stabilité d’horaires. C’était le cas pour la C6 ou C4. Sur certains corridors bus, nous souhaitons aller encore plus loin, en aménageant des sites propres, mais en effectuant également un travail sur les priorités aux feux et points noirs. C’est ainsi que le bus peut redorer le blason de ce mode de transport en manque de confiance. Avec d’autres aménagements de voirie en supplément et les services d’abri bus et billettique associés, nous arrivons à créer des Bus à Haut Niveau de Service (BHNS). En somme, des « tramways sur pneus », plus rapides et moins coûteux à mettre en place. Un nouvel axe de ce type est prévu entre la Part-Dieu et l’Est lyonnais.
Bien évidemment, le tramway a des fréquences et capacités encore supérieurs. C’est pour cela qu’on prévoit aussi un maillage important en tramways. Il s’agit désormais de quitter le réseau en étoile et de construire un réseau davantage en toile d’araignée, qui connecte les périphéries entre elles. Il s’agit de la fin du projet T6 et du démarrage d’une grande rocade avec les projets T9 et T10 qui lient des pôles d’attractivité importants et des Quartiers Politique de la Ville (QPV) comme le Mas du Taureau ou Saint-Fons. Comme l’indique le PDU, il y a un vrai enjeu sur les trajets périphérie à périphérie (en 2015, 7% des déplacements, en forte croissance [op. cit.]).
Face à l’éloignement progressif entre l’habitat et le lieu d’activité quotidienne, les trajets en transport collectif doivent pouvoir répondre aux attentes, afin de ne pas laisser l’augmentation des distances à des véhicules thermiques, néfastes pour le climat. C’est aussi un enjeu qui se retrouve à une échelle plus large de l’agglomération, mais aussi avec un aspect radial pour les trajets pendulaires de Saint Etienne, Bourgoin Jallieu, Bourg-en-Bresse, Villefranche-sur-Saône, Vienne etc. et leurs villes alentours.
C’est pourquoi nous devons parler de transports collectifs dans leur ensemble. Il s’agit donc également de discuter l’importance des cars, TER et tram-trains. Face à cela, notre ambition est de construire ce qu’on appelle un « RER à la lyonnaise », c’est-à-dire un réseau ferroviaire efficace qui permettent de répondre aux déplacements et volumes du quotidien, notamment depuis la deuxième ou troisième couronne autour de Lyon. Une tarification unifiée entre TCL et TER ira dans ce sens, ainsi que des investissements qui pourront être en partie portés par le SYTRAL (si la Région AURA accepte, car c’est elle qui a la compétence du ferroviaire de proximité). Avec des infrastructures existantes et une expertise française sur le sujet, ce réseau de trains et tram-trains du quotidien serait une solution efficace pour l’action publique. Cela permettrait aussi de répondre à l’enjeu d’intermodalité, notamment pour l’emport quotidien du vélo, comme cela est intensément pratiqué en Allemagne ou au Danemark. Enfin, la transformation du SYTRAL en établissement public début 2022 permettra de se reposer la question des cars (dont cars express) dans une région plus vaste que la Métropole de Lyon.
La collectivité est aussi là pour penser le long terme des déplacements. Le « RER à la lyonnaise » en fait partie avec les problématiques associés au nœud ferroviaire lyonnais, tout comme les évolutions sur le réseau de métro. Un nouveau projet de métro nécessite environ 15 ans et quelques milliards d’euros d’argent public pour voir le jour. Aujourd’hui, aucun projet neuf ne verrait le jour avant 2033. C’est pour cela que nous organisons une grande consultation sur le sujet [22]. D’abord, pour poser la question de quatre projets de métro et de leurs alternatives potentielles. L’idée est de partir des besoins et usages et d’essayer de prioriser ces projets ou leurs alternatives. Cela pourra permettre d’établir une feuille de route à long terme. Ensuite, c’est aussi pour se poser la question du développement des « transports lourds » dans l’agglomération, car un engagement dans de tels projets fige une mobilisation significative des chefs de projets, techniciens et bien-sûr moyens financiers. Il nécessite aussi de longs chantiers de construction avec des impacts carbone non négligeables selon les ouvrages nécessaires. Cela pose aussi la question de la projection des mobilités à 15 ans et ce qu’engendre le lancement d’une nouvelle infrastructure forte. S’il n’est pas simple de mener une consultation qui demande aux habitants de se projeter à long terme et d’adopter une posture avec une vision métropolitaine (et non personnelle), c’est toutefois un exercice intéressant et surtout pertinent vu les enjeux des deux prochaines décennies (modes de vie, financier, transports, etc.).
Ceci étant dit, l’infrastructure, ce n’est pas tout, il nous faut aussi rendre les transports en commun plus accessibles, car la voiture est effectivement pour beaucoup un moyen de déplacement assez peu cher à l’usage.
Toutefois, vu l’urgence climatique et le développement des transports en commun encore nécessaire, une gratuité généralisée ne saurait être efficace pour engendrer un report modal de la voiture individuelle thermique vers des modes moins polluants. Nous avons besoin de développer les alternatives et d’améliorer les conditions de service des offres existantes. A l’inverse, établir une gratuité généralisée impacterait fortement le budget de fonctionnement, pourtant essentiel pour offrir un service, une fréquence et autres de qualité. L’exemple régulièrement repris de Dunkerque n’en est pas un, car les dynamiques ne sont pas les mêmes, et aussi car le report modal observé n’est pas des plus positifs [23].
C’est pour cette raison que nous privilégions une gratuité ou des tarifications réduites ciblées. Elles sont essentielles pour répondre aux contraintes économiques des foyers engendrant une « précarité énergétique mobilité ». Baisser les tarifs des abonnements pour les personnes aux revenus les plus modérés est ainsi une évidence et nous avons déjà pu la mettre en œuvre avec l’instauration d’un abonnement « solidaire gratuit » et de la baisse à 10€ par mois de l’abonnement « solidaire réduit » [24]. C’est également essentiel pour les étudiants pour lesquels nous avons pu baisser le prix de l’abonnement, voire pu intégrer les plus précaires d’entre eux aux régimes « solidaire ». Nous voyons bien tout l’intérêt à offrir par ces mesures ciblées une solution de mobilité moins coûteuse et plus efficace à une partie significative de la population. Cela s’applique aux transports en commun, tout comme à d’autres solutions de mobilité de la collectivité, comme le vélo (tarif solidaire vélo’v ou l’offre Free vélo’v avec 10 000 vélos reconditionnés qui seront prêtés gratuitement à des publics jeunes avec de faibles ressources).
La question de la « précarité énergétique mobilité » est importante à comprendre, notamment dans sa dimension socio-économique. En effet, le phénomène de périurbanisation a engendré un allongement des distances. Les prix des logements, notamment en accession à la propriété, ont explosé au cours des dernières décennies. Pour les familles les plus modestes, rejoindre Lyon et louer un appartement devient de plus en plus difficile, ainsi que répondre à une volonté d’accession à la propriété [25]. Ce sont donc surtout « les ménages les plus modestes [qui doivent] supporter les dépenses de transport les plus élevées, non seulement en valeur relative (en proportion de leurs revenus), mais aussi en valeur absolue » [Publication POPSU 2021 ; 26]. Se pose ainsi la question immobilière de la construction de logements. Face à ce constat de la précarisation urbaine, le développement préférentiel du logement social (65% des français éligibles à du logement social [27]) est à mettre en œuvre, afin de garder toutes les populations proches de leurs activités et métiers.
Enfin, la question est aussi celle de l’accessibilité des transports pour les personnes à mobilité réduite. Si aujourd’hui tous les tramways et métros et leurs stations sont adaptés aux personnes à mobilité réduite, les arrêts de bus le sont à « seulement » 70% [28]. Les bus mêmes sont quant à eux conçus de manière inclusive. Il y a donc encore un travail important à faire, également en ce qui concerne les maintenances des ascenseurs ou escaliers mécaniques, ainsi parfois indisponibles. Enfin, le réseau possède un système « Optibus » efficace offrant un transport à la demande pour les inscrits, soit plus de 2000 personnes.
Le vélo au centre de la transition
Se déplacer à des coûts réduits par rapport à la voiture individuelle est un enjeu important de la transition des mobilités. Sur de multiples sujets, une transition écologique peut apporter des avantages tant environnementaux que financiers pour les ménages. Il s’agit d’une sorte de 13ème mois.
Le développement de la cyclabilité dans les zones urbaines en fait amplement partie. L’usage ou la possession du vélo est bien moins chère que tout autre mode motorisé. La différence est nette sur les coûts d’achat, mais surtout d’entretien. Par ailleurs, il répond aux enjeux d’efficacité, de sédentarité croissante et de transition écologique.
L’idée est bien de développer tout le « système vélo » pour créer un nouveau système de transport majeur, accessible à toutes et tous, pratique, efficace, convivial et porteur d’activités. Il s’agit non seulement de développer les infrastructures, sur lesquelles nous reviendrons, mais également les services autour. Il nous faut contribuer à bâtir une constellation d’acteurs publics, privés ou associatifs qui portent ces différents services.
On peut penser à la location vélo courte ou longue durée, la location à vocation plutôt touristique ou encore la location d’accessoires pour une occasion spéciale ou un essai de quelques jours (sacoches, sièges pour enfants, etc.). Les ateliers de réparations et d’auto-réparations de tous types sont essentiels. Leur maillage se doit d’être le plus adapté aux zones d’activités et d’habitat. Certains peuvent aussi faire l’objet de concepts mixtes, incluant comme dans d’autres villes européennes des cafés, salles d’exposition, espaces coworking ou autres.
Les entreprises ne sont pas exclues de cette transformation. D’abord, concernant l’avènement d’une filière importante de cyclologistique pour un approvisionnement plus adapté à la ville pour certains produits [Article précédent]. Ensuite, par l’organisation de défis en entreprise, ou encore l’instauration de vélos de services, l’installation de douches et box sécurisés, les essais pour des sociétés d’artisans, etc. En somme, c’est toute une culture autour du vélo qu’il faut créer, voire recréer, pour sortir des clichés éventuels et voir le vélo comme un des moyens de déplacement les plus efficaces et positifs sur les dix premiers kilomètres.
Cette culture du vélo passera aussi par l’éducation à la pratique du vélo. A commencer par l’école avec les programmes « savoir pédaler », « savoir circuler », puis « savoir rouler » [29]. Ce dernier est essentiel et largement sous exploité. L’objectif doit être qu’à l’entrée au collège, chaque élève puisse rouler en toute autonomie pour les trajets domicile-collège. Pour cela, il faut des sessions d’apprentissage en voirie dans les conditions réelles autour du collège et ailleurs. La participation des parents est essentielle, aussi afin d’ôter non seulement les craintes des enfants, mais également celles des parents. L’apprentissage des règles et bonnes pratiques permettra de former des adultes sensibilisés au respect des règles et à l’usage du vélo pour les courtes distances. D’ailleurs, avec l’essor du vélo passé et à venir, de plus en plus d’adultes se remettent en selle. A Lyon, la Maison du vélo porte une offre de formation de remise en selle pour adultes, ce qui est fort utile et aurait vocation à se généraliser. Cela vaut également pour une pédagogie à amplifier à destination de toutes et tous concernant, par exemple, les panneaux M12 « Cédez-le-passage cycliste » peu étudiés lors du passage du permis de conduire.

Si Lyon n’est, loin de là, pas la pire ville de France concernant les aménagements cyclables, il reste malgré tout un travail important, notamment sur la création de pistes cyclables physiquement séparées des autres flux, afin de garantir confort et sécurité. C’est ainsi et en particulier vu les distances parcourues en voiture, que nous pouvons accélérer l’adoption du vélo et allonger les distances parcourues. Jusqu’à 10 km, il devrait y avoir davantage de trajets en vélo et TC que de trajets en voiture individuelle. L’essor des vélos à assistance électrique (VAE) et vélos-cargo va dans ce sens, ils permettent de circuler avec moins d’efforts, notamment en pentes, et ainsi favoriser l’usage du vélo.
C’est pour cela que nous avons programmé la création d’un nouveau réseau de transport majeur, un « réseau express vélo » baptisé « Les Voies Lyonnaises » qui permet de mailler la Métropole de Lyon et ainsi traverser l’hypercentre et relier aussi les périphéries entre elles. Elles permettront aussi de faire le lien avec les gares du territoire pour améliorer l’intermodalité train-vélo, encore sous-exploitée par rapport à d’autres régions européennes.
Les Voies Lyonnaises, c’est un réseau de près de 400 km de voies cyclables d’ici 2030. Les 13 lignes mailleront le territoire pour permettre l’allongement des distances évoqué. Afin de répondre aux enjeux de confort et de sécurité des personnes, le gabarit cible est de 4 mètres de large (bidirectionnel) avec une séparation physique des autres flux. Cela permettra d’accueillir davantage d’enfants avec leurs parents ou seuls, ainsi que d’autres personnes encore peu à l’aise avec les cycles. La gestion des carrefours sera particulièrement travaillée, car ce sont les continuités et la lisibilité aux intersections qui peuvent faire la différence entre un réseau satisfaisant et un réseau prêt à accueillir tous les publics, de tous âges, comme c’est le cas aux Pays-Bas, par exemple. La signalétique servira une meilleure lisibilité avec des noms et couleurs de ligne permettant de s’orienter, en particulier aux croisements de lignes. Enfin, lorsque possible, ce réseau sera accompagné de végétalisations basses et hautes pour améliorer le cadre de vie, parfois accentuer une séparation d’autres flux ou encore participer à l’effort de perméabiliser les sols urbains.
Ainsi, Les Voies Lyonnaises permettront non seulement d’accueillir les trajets domicile-travail des « vélotafeurs », mais également les trajets domicile-étude des enfants en autonomie, les trajets dits « contraints » en journée (majoritairement effectués par des femmes), ainsi que les sorties loisirs en famille avec un gabarit permettant de rouler côte à côte sans gêne à la circulation.
Parfois, les freins à l’usage du vélo sont ailleurs. Nous avons pu l’entendre à Bruxelles par exemple, où une enquête réalisée indique qu’une partie des personnes n’avait tout simplement jamais pensé à prendre le vélo sur leurs trajets (lisibilité, culture personnelle, manque de mise en avant dans les applis d’itinéraires, etc.). A l’heure des VAE, vélos cargo, pliables ou tout simplement de bonne qualité, c’est le stationnement et surtout la sécurité du stationnement qui devient un enjeu. Les arceaux vélos, déployés un peu partout, permettent de répondre aux besoins des pôles d’activités de tous types, moins aux besoins de stockage de longue durée, la nuit ou sur plusieurs jours. Aujourd’hui, l’offre de stationnement sécurisé accuse un sérieux retard dans la Métropole avec un millier de places dans les parkings LPA et quelques centaines dans les parkings SNCF aux abords de gares ou garages privés mutualisés. L’enjeu est d’augmenter significativement le nombre de places de stationnement sécurisé, que ce soit dans les parkings publics, des box en voirie ou des rez-de-chaussée divers. Pour les résidences les plus récentes, il existe aussi des locaux vélos qui visent à être généralisés et améliorés. C’est pour cela que nous modifierons le PLU-h pour augmenter les seuils et critères de stationnement sécurisé dans les nouvelles constructions.
Sur ce sujet, comme tant d’autres, c’est bien une multitude de solutions et de lieux qui permettront de répondre à ce besoin croissant. Ce dernier est déjà important aux abords des pôles d’échanges multimodaux, comme la gare de la Part-Dieu ou Perrache. Dans le cadre des projets urbains associés, nous créerons des vélostations plus importantes pour répondre aux besoins des usages locaux et de l’intermodalité train-vélo du quotidien. Ces vélostations seront davantage de l’ordre de centaines ou milliers de places étant donné les flux.
Quelles évolutions pour le stationnement des voitures ?
Mais quid du stationnement automobile ? D’abord, il faut rappeler les différents usages du stationnement, d’une part par des visiteurs occasionnels de tous horizons, d’autre part des pendulaires du quotidien, des professionnels du service à domicile ou encore des résidents. Jusqu’à aujourd’hui, la politique était d’enterrer le plus possible la voiture pour qu’elle soit moins visible, que ce soit en circulation (trémies et tunnels) ou en stationnement dans les parkings souterrains (publics ou privés). Cela permettrait de reprendre un minimum d’espace de stationnement pour d’autres usages, mais nous y reviendrons dans un chapitre ultérieur.
Face au constat de l’urgence climatique et de la pollution de l’air, il nous faut adopter une stratégie plus pragmatique. Le fait est que le stationnement et les conditions de stationnement induisent plus ou moins d’usage de la voiture individuelle [30]. Ainsi, afin d’accompagner la démotorisation des ménages et en parallèle du développement des alternatives évoquées dans cette publication, il faut viser une réduction du stationnement en ville. De même que pour la circulation, la transition des mobilités fonctionne par un duo développement+contrainte, afin de susciter le report modal et les changements de comportements.

Le graphique ci-dessus décrit l’évolution prospective de l’offre de stationnement entre 2015 et 2030. Le constat que nous pouvons établir aujourd’hui est une offre très importante de stationnement en comparaison aux voitures possédées par les lyonnaises et lyonnais, permettant non seulement de stationner l’intégralité des véhicules, mais également d’accueillir bon nombre de véhicules venant de l’extérieur. Il faut toutefois préciser que les parkings privés des entreprises ne sont pas inclus dans le graphique ci-dessus, mais accueillent une partie significative des véhicules venant de l’extérieur de Lyon.
Le scénario tendanciel est déjà à la baisse de la motorisation des ménages lyonnais (et c’est également le cas pour certaines communes de la première couronne). Et ce malgré l’augmentation de la population, portée par les naissances et l’attractivité de la capitale des Gaules. Ainsi, dans les années à venir, l’offre de stationnement à Lyon serait largement supérieure aux besoins. La nécessité d’accélérer la démotorisation entraine également une nécessité cohérente de diminuer l’offre de stationnement. D’abord, dans l’espace public, afin de pouvoir rendre la surface aux habitants. Il s’agit là du gisement le plus important, couplé à d’autres enjeux que nous verrons juste après.
Le potentiel de réduction dans les parkings publics est limité, même si le développement du stationnement sécurisé pour vélo, ainsi que des aires réservées, viendront diminuer le nombre de places. Ces parkings – par ailleurs tous en hypercentre de la Métropole – ont toutefois une vocation d’accueillir les résidents ou visiteurs très réguliers, ainsi que les touristes motorisés, à court terme.
Quant à l’offre privée dans les habitations, elle ne bougera que très peu. Tout simplement parce que les poches de stationnement souterraines ne vont pas disparaitre. Certains espaces sont utilisés comme lieux de stockage ou pourraient être imaginés pour d’autres usages, mais cette réduction est marginale. Aussi, la réalité est qu’une partie des constructions du début des années 2020 pourront et devront encore construire des nappes de parking, conformément au Plan local d’urbanisme et d’habitat (PLU-h) en vigueur dans la Métropole de Lyon [31]. Notre objectif, à travers la modification n°3 du PLU-h, sera de baisser au maximum et rendre cohérents les minimas exigés par la collectivité selon le nombre de logements. Cela se fait par zones, en cohérence avec l’accessibilité à différentes zones de transport en commun lourds (métro, tramway et lignes de bus structurantes). On pourrait imaginer prendre en compte d’autres offres de mobilités, mais telle est la réalité du moment.
Ceci étant dit, toute l’offre de stationnement privée (indiquée en noir) dans les résidences n’est pas accessible. Aujourd’hui, plusieurs entreprises existent ayant développé un service de mutualisation des places. Chaque copropriété peut décider de vouloir louer une dizaine de places pour un usage à des résidents d’un immeuble à 100 mètres, sans solution de stationnement automobile. Ces entreprises prennent alors en gestion ces places et trouvent des intéressés. Cela permet d’ouvrir davantage de places au public et a l’avantage d’optimiser les coûts globaux de ces places, particulièrement chères lorsque construites en souterrain (travaux lourds dont la gestion de la nappe phréatique). Nous allons travailler avec l’ensemble de ces acteurs pour partager les enjeux de stationnement par quartier, en cohérence aussi avec les projets d’aménagements urbains ou de développement des transports collectifs. Cette mutualisation réduit la nécessité pour les collectivités de créer davantage de places de stationnement.
Aussi, mentionnons qu’il y a des enjeux particuliers d’augmenter les places de stationnement dites réservées. Il s’agit de places spécifiques à certains usages, comme les aires de livraison ou les places dédiées aux personnes à mobilité réduite. Pour ces dernières, le stationnement est gratuit en général (avec la vignette correspondante), mais des places réservées existent sur demande ou à des endroits clés (proches d’établissement de santé par ex.). La réduction du stationnement général nécessite de repenser la place des aires réservées. De même que l’augmentation à venir des véhicules électriques pour les personnes ayant encore besoin d’une voiture au quotidien nécessite des bornes de recharge. Dans la Métropole de Lyon, le déploiement des bornes de recharge a été retardé par la pandémie, mais est largement engagé, notamment avec un retrofit des anciennes bornes Bluely [32]. Le maillage sera important et pourra être ajusté au fur et à mesure en suivant les évolutions du parc « crit’air verte ».
Il est à mentionner que peu de données existent sur une élasticité offre/possession ou tarif/possession sur le sujet du stationnement [33]. Durant le mandat, nous reverrons la tarification du stationnement en cohérence avec les objectifs écologiques fixés et en cherchant à mettre en place une tarification solidaire pour les abonnés résidents.
Enfin, étant donné que Lyon se situe dans l’hypercentre de la Métropole et afin aussi d’améliorer les conditions de stationnement pour les usagers réguliers (riverains et autres), il s’agira d’augmenter fortement le nombre de places réglementées payantes. Aujourd’hui, la moitié de la ville est encore gratuite, y compris dans des zones à fortes tensions, alors qu’une ville comme Paris est entièrement payante, par exemple. Le stationnement payant permet d’augmenter le taux de rotation des voitures sur ces places et ainsi d’optimiser l’usage de l’espace public. Les voitures dites « ventouses », non utilisées au quotidien et parfois même pas de manière hebdomadaire, sont ainsi invitées à trouver une autre solution. Cela peut amener à une démotorisation, notamment en lien avec l’offre d’autopartage existante, nous y reviendrons.
Mobilités urbaines et espaces publics, destins liés.
Nous sommes face à une situation d’optimisation sous contraintes. Il s’agit d’effectuer cette transition des mobilités dans une ville avec un urbanisme largement figé. Un meilleur partage de l’espace public pour donner davantage de places aux modes actifs et usagers des transports collectifs est ainsi souhaité. Toutefois, l’espace public a d’autres enjeux que les seules mobilités et parmi eux, des enjeux particulièrement importants. Dans une approche transversale, il s’agit de ne pas faire de l’urbanisme (aménagement urbain) sans penser les mobilités en cohérence et il ne s’agit pas non plus de penser les mobilités sans penser l’aménagement urbain et ses enjeux.
En lien immédiat avec les objectifs des mobilités, il y a la question climatique. Les alternatives aux voitures thermiques permettent de contribuer à l’atténuation du changement climatique. Ce dernier étant malheureusement largement engagé, il s’agit désormais de penser aussi l’adaptation aux différents changements à venir. En milieu urbain dense, les îlots de chaleur se font nombreux. En cause notamment les revêtements utilisés qui font office de « chauffage à retardement », cumulant durant la journée toute la chaleur du soleil et la restituant très lentement. Les espaces verts sont souvent rares et ne permettent pas une évapotranspiration importante des végétaux, contribuant pourtant au rafraichissement de l’air. L’enjeu est donc de venir décrouter la ville et de perméabiliser au maximum les sols pour faciliter l’infiltration des eaux de pluie, ainsi que végétaliser sur différentes strates. Nous avons déjà pu évoquer l’importance du confort de la marche à pied. Ce confort est également augmenté lorsqu’il y a des parcours ombragés, par ailleurs un enjeu pour les Voies Lyonnaises.
Ces nouveaux usages ont besoin d’espaces et c’est notamment le stationnement existant qui permettra de répondre à la recherche de place. Afin d’améliorer le cadre de vie, la voirie au sens large est aussi là pour aménager des espaces de détente, des aires de jeux pour enfants, des composteurs ou bacs de collecte de biodéchets ou tout simplement des bancs et tables.

Ce qui détermine également un bon cadre de vie est la capacité à avoir un logement satisfaisant plutôt proche de son lieu d’activité et dans un quartier permettant de répondre aux besoins essentiels. Nous avons pu déjà évoquer la question de l’habitat avec des enjeux particuliers de développement du logement social, y compris en hypercentre, de l’encadrement des loyers, du déploiement des baux réels solidaires [34], d’une vigilance sur les changements d’usage, etc.
La question des commerces et services publics à proximité est également un enjeu majeur. C’est ce que développe le concept de la « ville du quart d’heure », indiquant qu’en 15 minutes à pied ou à vélo, on puisse avoir accès aux commerces et services publics nécessaires au quotidien, mais également à des offres culturelles riches et de la diversité commerciale. Cela crée une vie de quartier dynamique et a un potentiel plus important pour tisser des liens et ainsi créer un quartier convivial, sûr et solidaire. Cela a également l’avantage de réduire les distances à parcourir pour les besoins du quotidien. A une échelle plus large, c’est le concept de « polycentrisme » qui est à développer. C’est vrai au sein de la ville de Lyon, avec des cœurs de quartier autres que la presqu’île, que dans la Métropole plus large avec un besoin essentiel (et équivalent au niveau national) de redynamiser les centres-bourgs, a minima pour ces besoins du quotidien. Le manque de commerces et de services publics à proximité augmente le besoin en mobilité, mais aussi une forme d’individualisme, loin des ingrédients nécessaires pour une société unie.
Avec la diminution choisie pour lutter contre l’emballement climatique, et subie face aux incertitudes des marchés pétroliers dans les années à venir, le report modal sera important de la voiture thermique individuelle aux modes actifs et transports collectifs. Ces derniers pourraient également favoriser le développement de ce polycentrisme urbanistique, en parallèle de politiques publiques économiques et commerciales allant en ce sens, en diminuant la compétitivité de la distance pour des déplacements quotidiens.
Est également apparu récemment le concept de la « ville minute » en Suède. Il s’agit de se réapproprier les espaces publics immédiatement autour de chez soi. Cela rejoint, dans une approche plus longue et transitoire, le concept du « parking day » né en Californie, visant à se réapproprier les places de parking le temps d’une journée évènement. A Lyon, certains quartiers sont proches de la « ville minute » en termes de dynamisme de quartier, comme le centre de la Croix-Rousse, les rues autour de Valmy, le Vieux-Lyon, l’avenue des Frères Lumière, les rues Chevreul ou Vitton, ou la presqu’île bien évidemment.
Lyon, ville sans voiture ?
Alors, Lyon deviendra-t-elle en quelques années seulement une ville sans voiture ? En somme, la réponse est non, l’usage de la voiture sera encore nécessaire pour de nombreuses années. Cela concerne en premier lieu des artisans et autres professionnels, même si certains auront pu transitionner vers de la fluvio-cyclo-logistique. Cela concerne également des habitantes et habitants lyonnais qui travaillent en horaires décalées non compatibles avec les TC et/ou à des endroits non accessibles autrement. Cela concerne aussi des grands lyonnais et personnes d’autres départements, ayant choisi ou non de travailler au centre de la métropole lyonnaise et d’habiter bien au-delà, sans alternative en transport en commun.
Pour ces derniers, il existe des parkings relais [35] tout autour de la ville et métropole de Lyon, permettant de déposer son véhicule, puis d’utiliser les transports collectifs pour rentrer en ville. Environ 10 000 places sont disponibles dans les parcs relais TCL, ainsi que des milliers d’autres notamment aux abords directs des gares SNCF de la Région. Concernant les P+R TCL, nous faisons face à un besoin croissant, mais des capacités limitées et avec un coût de construction de l’ordre de plusieurs milliers d’euros par place de stationnement automobile. Nous voyons aussi que certains parcs relais drainent une majorité de personnes habitant à moins de 5 km. Enfin, le taux de remplissage des voitures est à peine plus élevé qu’ailleurs (1,1 personne en moyenne par voiture). Ainsi, en théorie, 40 à 50 000 personnes habitant à une dizaine de kilomètres ou plus des parcs relais pourraient bénéficier de cette offre. Clairement, des optimisations doivent être étudiées, puis mises en place. Ces études pourront également inclure une ouverture des P+R la nuit pour les habitants de la Métropole et ayant un emploi non accessible en TC bien à l’extérieur.
En somme, en lien avec le constat des faibles distances parcourues à voiture, l’enjeu est d’offrir une alternative efficace pour les déplacements de moins de 10 km, que ce soit à vélo ou en transports en commun de tous types. Cela permettra de libérer de l’espace dans les zones les plus denses, aussi pour les personnes ayant le plus besoin de leur voiture.
Régulièrement, nous faisons face à des idées reçues fortes sur la motorisation ou non des ménages, en fonction de leur situation familiale, du lieu de résidence, des catégories socio-professionnelles ou autres. A Lyon intra-muros, il est important de voir que le taux de motorisation est le plus faible pour les personnes ayant des emplois avec des revenus plutôt modérés. Aussi, le fait d’avoir des enfants modifie légèrement le taux de motorisation en absolu, mais pas la structuration en fonction des CSP. Beaucoup de familles avec enfants n’ont pas de voiture en réalité.

Si le taux d’équipement des ménages est à la baisse à Lyon et certaines communes de première couronne, il est (malheureusement) à la hausse à l’échelle métropolitaine ou encore nationale.
Pour améliorer les conditions de circulation, mais aussi optimiser les ressources liées aux voitures (métaux, plastiques, carburants) et l’occupation de l’espace public, il nous faut développer le covoiturage. Non seulement le covoiturage de longue distance, essentiel et économique pour voyager, mais également le covoiturage du quotidien. Des plateformes privées et publiques [36] existent, le numérique ayant largement facilité la recherche d’une âme-sœur des déplacements domicile-travail. S’y inscrire est simple et n’engage en rien, mais permet de potentiellement contribuer à une meilleure organisation des mobilités régionales. Comme dans d’autres métropoles de France, le développement des voies réservées aux covoitureurs sur les grands axes permet de donner un avantage concurrentiel pour les voitures de deux personnes ou plus. Les aires de covoiturage permettent de fixer des points de rendez-vous, notamment pour les usagers plus occasionnels du covoiturage.
Enfin, un dernier constat doit être établi sur l’occupation de l’espace public par les voitures. Le graphique ci-dessous indique les voitures présentes au cours d’une journée à Lyon-Villeurbanne en fonction de l’heure de la journée. On y observe que le centre métropolitain accueille des automobilistes entre 7h et 19h depuis la périphérie proche ou lointaine et qu’une partie des résidents quitte le centre pour les trajets quotidiens. La partie intéressante sont les voitures immobiles au quotidien, soit 120 000 véhicules. La plupart de ces voitures ne sont utilisées que ponctuellement ou pour des trajets réguliers, mais peu fréquents. Cette partie est un vivier important de développement de l’autopartage, c’est-à-dire l’usage d’une voiture partagée, disponible dans l’espace public ou privé, pour un temps donné. L’autopartage est surtout intéressant pour les trajets occasionnels et non les trajets quotidiens pour lesquels la possession d’un véhicule est souvent plus avantageuse. Nous allons développer l’autopartage avec un maillage dense pour que chaque habitant ait un véhicule disponible à proximité lorsque nécessaire. C’est ainsi que nous pouvons optimiser l’espace utilisé en ville, dans l’espace public comme privé, tout en permettant à la population de garder un usage de la voiture, par exemple pour faire des courses particulièrement lourdes ou volumineuses, ou encore pour partir en week-end dans un endroit non accessible en train ou car. Là encore, l’application d’une tarification solidaire paraît opportune, afin d’offrir une solution de plus au plus grand nombre.

Lyon sans voiture, pas tout de suite, mais… Prenons un peu de hauteur pour établir une prospective à plus long terme. D’abord celle de la fin de la vente des véhicules thermiques à un échelon européen d’ici 2035. A partir de ce moment, seuls des véhicules thermiques existants et électriques (existants ou neufs) pourront circuler dans l’U.E. Etant donné les capacités pétrolières et minérales et les enjeux économiques et géopolitiques associés, on peut aisément imaginer des tensions très fortes sur les chaines de productions. C’est ce qu’on observe déjà à faible échelle en cette année 2021 sur de nombreux produits, dont certains métaux ou la micro-électronique. Ceci, couplé à des trajectoires probablement insuffisantes sur le climat, voire la pollution de l’air, pourrait amener durant les années 2030 à une disparition de la voiture personnelle des centres des métropoles.
Conclusion
J’ai pu retracer dans cet article la transition des mobilités portées par les écologistes à Lyon et dans sa Métropole. Elle se base sur un bouquet d’alternatives à la voiture individuelle, développées avec un effort humain, financier et organisationnel sans précédent. Ce bouquet est construit de telle sorte qu’il répond à un certain nombre de constats évoqués, chiffres à l’appui. En particulier, nous avons pu souligner l’aspect sanitaire significatif de la transition des mobilités. Il se décline en plusieurs sujets, dont bien évidemment les enjeux majeurs du changement climatique et de la pollution de l’air.
Cette transition peut paraitre difficile et trop rapide, mais nous voyons à quel point elle est essentielle vu les enjeux sanitaires et de bien-être sous-jacents. La Métropole de Lyon a déjà aujourd’hui de multiples solutions alternatives pour se déplacer efficacement et d’autres viendront tout au long des cinq années à venir de cette mandature avec des offres spécifiques pour les publics aux revenus les plus faibles. Pour beaucoup, ces alternatives sont également plus économiques et inclusives, ce qui est un facteur non négligeable. Un récent article sur Lyon CityCrunch [38] retrace bien les possibilités pour se déplacer sans voiture dans la Capitale des Gaules.
Durant les prochaines années, il s’agira d’encourager et de faciliter une mobilité décarbonée, plus inclusive et plus équitable. Comme tout sujet en lien avec le changement climatique, il s’agit de transformer nos modes de vie aujourd’hui pour garantir un avenir soutenable et désirable, garantissant encore les libertés fondamentales telles que nous les connaissons aujourd’hui. La transition des mobilités engagée est une somme d’actions individuelles et d’engagements collectifs pour retrouver le plus rapidement possible une trajectoire alignée avec les accords de Paris sur la lutte contre le changement climatique et retrouver des niveaux de polluants en-deçà des normes de l’OMS. C’est enfin permettre à la ville de se transformer et de s’adapter au changement climatique. En bref, une transition pour un meilleur cadre de vie.
En bref
Cet article retrace les liens majeurs entre le contexte global, les constats les plus importants en matière de mobilité et les diverses solutions apportées pour concrètement effectuer la transition des mobilités.
Contexte : pollution de l’air de fond ; urgence climatique ; multiples enjeux de santé publique
Constats : l’impact du bruit et de la pollution sur la santé humaine ; la sédentarité grandissante avec nos modes de vie ; l’accidentologie aux conséquences graves ; les transports comme premier secteur contributeur aux émissions GES ; une motorisation en baisse ; une majorité des trajets en voiture inférieurs à 10 km et avec un seul passager ; de nombreuses voitures non utilisées pour des trajets quotidiens ; une augmentation pluriannuelle de la précarité mobilité ; des espaces publics largement dévolus à la voiture (circulation et stationnement)
Face à cela, il convient de développer fortement tout un bouquet d’alternatives à la voiture, avec des tarifications aidantes pour des publics ciblés, et de réduire la place de la voiture dans l’espace public pour réduire son usage et pouvoir favoriser d’autres usages plus inclusifs. Pour les distances de moins de 10 km, l’objectif est que le maximum de trajets puissent se faire à pied, en vélo ou en transports collectifs divers. Pour cela, les aménagements et services (piétonisations, stratégie d’entretien, signalétique, les Voies Lyonnaises, ateliers de réparation, etc.) autour de la marche et du vélo seront fortement développés pour plus de confort et sécurité. Les transport en commun feront l’objet d’un plan de mandat sans précédent pour le déploiement de nouvelles lignes de tramways et de bus, à plus long terme aussi de ferroviaire du quotidien, de transport par câble et de métros. Des tarifications solidaires ciblées (personnes aux revenus modérés, étudiants, etc.) seront mises en places pour les transports en commun, ainsi que pour d’autres services de mobilité. Les trajets occasionnels en voiture (weekends, charges lourdes, etc.) pourront être effectués avec des véhicules en autopartage, fortement développés. Les espaces publics seront mieux partagés entre les différents modes de déplacement, mais aussi pour de nombreux autres usages (végétalisation, aires de jeux, collecte biodéchets, etc.). Les déplacements de longue distance seront encouragés au maximum par des modes collectifs ou en covoiturage. Ce dernier sera également encouragé et développé (aires, voies réservées) pour les trajets du quotidien pour les personnes ayant besoin de leur voiture au quotidien. Ainsi, une majorité des trajets de courte distance et une partie des trajets de longue distance pourra se faire avec des modes les moins polluant et impactant. Cela permet la transformation souhaitable de l’espace public et la mobilité en voiture pour celles et ceux qui en ont encore besoin, depuis ou vers le centre de la Métropole. La généralisation du 30 km/h et la mise en place d’une zone à faibles émissions ambitieuse permet de répondre aux enjeux de pollution de l’air, bruit et accidentologie. Ainsi, Lyon se place dans une optique d’être à la hauteur de la réduction des émissions de gaz à effet de serre et de l’amélioration de la santé et de la qualité de vie à Lyon et dans sa Métropole.
FAQ
- Quels moyens financiers pour cette transition ?
Un plan de mandat 2020-2026 sans précédent, doublé par rapport aux années précédentes pour les transports en commun. Soit 2,55 milliards d’euros pour l’investissement dans de nouvelles infrastructures. 100M€ pour le projet des Voies Lyonnaises, ainsi que plusieurs dizaines de millions d’euros pour des pistes cyclables, arceaux vélos, stationnement sécurisé. Aussi, une quarantaine de millions d’euros pour les aménagements de proximité dans les espaces publics (Ville 30, rues des enfants, etc.). Enfin, de nombreux recrutements dans les services et certaines augmentations du budget de fonctionnement pour de meilleurs services. A cela s’ajoutent d’autres budgets pour les espaces publics (végétalisation, grands projets d’aménagements, éclairage public, etc.). - Quels aménagements majeurs de transformation de l’espace public ?
De nombreux aménagements sont prévus pour mieux partager l’espace public et végétaliser la ville. De nombreux projets locaux, mais aussi de plus amples transformations. Par exemple, la requalification de la rive droite du Rhône, la transformation de l’avenue des Frères Lumière, la prochaine phase de la rue Garibaldi, des espaces publics agréables dans les quartiers de la Part-Dieu ou de la Confluence, ou encore des piétonisations ou apaisements des cœurs de quartier.
Sources:
Image de couverture issue du Plan de Mandat 2020-2026 : https://mairie1.lyon.fr/sites/mairie1/files/content/2021-03/Plan%20de%20mandat_2020_2026_1.pdf
[1] https://www.ecologie.gouv.fr/strategie-nationale-bas-carbone-snbc
[2] https://blogs.grandlyon.com/plan-climat/wp-content/blogs.dir/8/files/2020/09/01-PCAET_MetropoleDeLyon_2019-2030-VersionMAJ.pdf.pdf
[3] https://www.conseil-etat.fr/actualites/actualites/pollution-de-l-air-le-conseil-d-etat-condamne-l-etat-a-payer-10-millions-d-euros
[4] https://www.conseil-etat.fr/actualites/actualites/pollution-de-l-air-le-conseil-d-etat-condamne-l-etat-a-payer-10-millions-d-euros
[5] https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/ambient-(outdoor)-air-quality-and-health
[6] https://www.atmo-auvergnerhonealpes.fr/sites/ra/files/atoms/files/bilanqa2019_zoom69-rhone.pdf
[7] https://www.senat.fr/rap/r14-610-1/r14-610-11.pdf
[8] https://www.certificat-air.gouv.fr/
[9] https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-36643-rapport-ocde-emissions-hors-echappement.pdf
[10] https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1352231020306208
[11] https://www.onisr.securite-routiere.gouv.fr/recherche-statistique-des-accidents
[12] https://ville.montreal.qc.ca/visionzero/documents/vision-zero-ville-de-montreal-2019-2021.pdf
[13] https://www.ingentaconnect.com/content/ince/incecp/2017/00000255/00000004/art00110
https://trid.trb.org/view/415897
[14] https://www.euro.who.int/fr/media-centre/sections/press-releases/2018/press-information-note-on-the-launch-of-the-who-environmental-noise-guidelines-for-the-european-region
[15] British Medical Journal, UK Biobank: Celis-Morales et al., Association between active commuting and incident cardiovascular disease, cancer, and mortality: prospective cohort study. BMJ 2017;357:j1456
https://www.bmj.com/content/bmj/357/bmj.j1456.full.pdf
[16] https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-03082127
[17] https://fr.wikipedia.org/wiki/Distance_d%27arr%C3%AAt
[18] https://carlabelling.ademe.fr/chiffrescles/r/evolutionMasseMoyenne
[19] https://propositions.conventioncitoyennepourleclimat.fr/pdf/tl/ccc-sedeplacer-agir-sur-la-reglementation-et-aider-a-la-transition-vers-un-parc-vehicules-propres-tl.pdf
[20] https://climobil.connecting-project.lu/
[21] https://www.sytral.fr/306-presentation_pdu.htm
[22] https://destinations2026-sytral.fr/processes/consultation-metro
[23] https://twitter.com/ellibec/status/1430587020443889671?s=21
[24] https://www.tcl.fr/solidaire
[25] La volonté d’accession à la propriété a des raisons de représentation sociale et est inégale entre catégories socio-professionnelles. Même si nous pourrions discuter de la pertinence, il s’agit souvent d’une décision multifactorielle, non seulement liée à la volonté de propriété pour correspondre à un schéma de vie valorisé par la société.
[26] Métropole et éloignement résidentiel, Vivre dans le périurbain lyonnais, Eric Charmes, POPSU 2021
[27] https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/le-vrai-du-faux/70-des-francais-eligibles-a-un-logement-social_1772927.html
[28] https://www.tcl.fr/services/accessibilite-du-reseau
[29] https://sports.gouv.fr/savoir-rouler-a-velo/
[30] EPLF-CERTU 1996 ; Contraintes de stationnement et pratiques modales, CERTU 2009 ; Les déterminants du choix modal, L’institut Paris Région, 2020
[31] Constructions minimales de stationnement demandées par la collectivité dans le cadre du PLU-h (état 2020) : selon le zonage (A, B, C), les minimas sont à 0,6 , 0,9 ou 1 place par logement. Les normes de construction effectives étaient au-dessus dans certaines zones durant les années passées.
[32] https://grandlyon.izivia.com/
[33] Par élasticité est indiquée la causalité entre deux facteurs, par exemple quel impact aurait une baisse de 10% de l’offre de stationnement sur la possession ou l’usage de la voiture.
https://www.oecd.org/officialdocuments/publicdisplaydocumentpdf/?cote=ENV/WKP(2019)4&docLanguage=En#:~:text=They%20considerably%20increase%20CO2%20emissions,leads%20to%20more%2
[34] https://www.lyoncapitale.fr/actualite/la-metropole-de-lyon-casse-les-prix-de-limmobilier-avec-ses-logements-en-bail-reel-solidaire/
[35] https://www.tcl.fr/services/parcs-relais
[36] Par exemple, https://encovoit-grandlyon.com/
[37] Agence d’urbanisme de Lyon, « Chiffres clefs du transport » 2019
[38] https://lyon.citycrunch.fr/vivre-a-lyon-sans-voiture-mode-demploi/2021/05/25/